“Est-ce que partiellement complet est l’équivalent de complètement partiel?”, passant outre l’absurdité de la juxtaposition, se demandait-il au moment même où sa tasse de café arriva à sa table. Si partiellement complet serait une façon superflue de dire tout simplement “partiellement”, en cette manière que la propriété que quelque chose soit complet soit partiellement concrétisée, comment se fait-il qu’il ait l’impression que “complètement partiel”, dans l’ordre inverse, ne veuille pas dire exactement la même chose; que dans ce cas, cela puisse évoquer plutôt la propriété que quelque chose soit assurément partiel bien que, le choix des mots ne soient pas judicieux dans ce cas. “C’est complètement fou” pensa-t-il peu avant de renverser sa tasse, cette dernière se vidant ainsi complètement de son contenu maintenant partiellement sur la table, partiellement par terre, partiellement entre les deux, tombant sous forme de gouttes de la table dégouttante, non pas dans le sens contraire de ragoutant, mais plutôt dans le sens, inapproprié au français, d’un objet dont s’échappe des gouttes. Décontenancé et distrait par cette caféïne répendue et perdue, ses pensées s’évaporèrent quand, pris de dépourvu, il vit venir vers lui la serveuse, guenille à la main, pour éponger le dégât. Coïncidence, tel qu’il allait le découvrir bientôt, elle était étudiante en lettre et s’intéressait à la langue française, quoique différemment de lui. Il aurait peut-être l’occasion de reprendre le fil de ses pensées et de les partager un jour avec elle, mais pour l’instant, il était, comme le café, absorbé, bien que différemment quand même, par la situation et loin de se douter qu’il allait vivre au complet le partiel de sa vie qu’il lui restait avec elle.

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